Journal Le Point. Publication du 26 mai 2025. Par Julie Malo.

Un packaging à l’esthétique léchée qui promet un produit boostant, non addictif, et décliné en une quarantaine d’arômes.
C’est ce dont se vante la 6-méthyl-nicotine, également appelée métatine.
Vendue sous la forme de cigarettes électroniques ou sachets oraux, celle-ci est pourtant potentiellement très addictive, plus que la nicotine, et a été épinglée par le Comité national contre le tabagisme (CNCT).
Dans un communiqué publié ce lundi, l’association reconnue d’utilité publique tire la sonnette d’alarme et annonce attaquer en justice le fabricant Aroma King.
Elle souligne que la molécule de synthèse « présente une affinité pour les récepteurs nicotiniques pouvant être jusqu’à 3,3 fois supérieure à celle de la nicotine ».
Qui plus est, elle pourrait induire « une production plus importante de dopamine, renforçant son potentiel addictif ».
Ce n’est pas tout : la 6-méthyl-nicotine augmenterait les « espèces réactives de l’oxygène », qui favorisent l’inflammation et qui abîment les cellules.
Ses effets au long cours ne sont, en plus, pas encore connus.
Un marketing mensonger et qui vise les jeunes |
Le marketing vise explicitement de très jeunes consommateurs, d’après le CNCT : sachets colorés, esthétique léchée, des dizaines d’arômes disponibles ?
Et la promesse d’un effet boostant sans risque de dépendance, qui améliorerait la concentration ou les capacités physiques.
Le tout, sur des réseaux sociaux massivement investis par les jeunes, comme TikTok ou Snapchat.
L’organisme déplore aussi l’intensification du marketing promotionnel pour les cigarettes électroniques, jetables ou non, « en violation de l’interdiction de publicité ».
En plus d’un nombre d’arômes toujours plus élevé, le comité note la commercialisation « de nouveaux dispositifs de vapotage dits intelligents? », avec des gadgets, qui intègrent des éléments ludiques comme des mini-jeux, visant ouvertement les jeunes.
Dans les bureaux de tabac, le CNCT a noté que les produits à base de 6-méthyl-nicotine étaient vendus comme contenant « 0 mg » de nicotine ou avec « effet nicotine 5 % ».
Pour le Comité national contre le tabagisme, cela induit en erreur les consommateurs, poussés à penser que ce qu’ils achètent ne contient ni nicotine ni danger.
L’organisme dénonce aussi l’opacité de la composition, pas toujours entièrement détaillée, et le fait qu’il « n’existe actuellement aucune réglementation claire sur les dosages autorisés.
Cette opacité accroît les risques d’exposition à des doses toxiques ».
Contournement des réglementations |
L’association note aussi que la métatine a été « conçue à partir d’une modification chimique de la nicotine, avec l’ajout d’un groupe méthyle, et présente une structure suffisamment différente pour ne pas être classée comme la nicotine au sens réglementaire », ce qui lui permet « d’échapper à certaines réglementations en vigueur sur les produits nicotiniques classiques ».
Et de conclure sur son utilisation comme « outil de contournement des réglementations sur les produits contenant de la nicotine.
En s’appuyant sur une molécule différente, les fabricants évitent certaines obligations comme l’autorisation de mise sur le marché, les restrictions sur les arômes, les volumes de e-liquide ou encore la fiscalité applicable ».
La Journée mondiale sans tabac, célébrée le 31 mai, a cette année pour thème « Levons le masque ».
Le CNCT espère débusquer les stratégies des industriels du tabac et de la nicotine pour « rendre leurs produits plus attrayants, en particulier pour les jeunes ».