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La culture de cannabis en intérieur.

La culture de cannabis en intérieur.


Depuis plusieurs siècles, la France est un pays producteur de chanvre industriel.

En marge de cette activité réglementée apparaissent désormais des cultures de cannabis ayant une toute autre finalité.

Le développement de cette « cannabiculture » a dans un premier temps été constaté aux Pays-Bas et en République Tchèque avant de s’étendre à la Belgique ou encore au Royaume-Uni.

Ce phénomène est aujourd’hui présent en France.
S’inscrivant initialement dans une logique d’auto-production, l’attrait financier de la culture de l’herbe de cannabis suscite désormais l’appétit des usagers voire des usagers-revendeurs.

À l’origine sans lien avec les organisations criminelles, la dimension lucrative de cette culture conduit aujourd’hui le crime organisé à s’intéresser de très près au marché de la production d’herbe de cannabis. Ces groupes criminels, n’entendant pas se priver de cette manne financière, portent un intérêt croissant à la culture en intérieur. La diminution de la prise de risque et des coûts de transport (induite par la proximité des zones de production et de consommation) plaident en faveur de l’implantation sur notre territoire de plantations d’envergure.

Par ailleurs l’existence de connexions entre la culture d’herbe de cannabis à grande échelle et les réseaux d’immigration clandestine a été démontrée dans plusieurs pays européens dont la France.

Le danger est donc réel de voir la culture intensive de cannabis se développer sur notre territoire et prendre le pas sur la « cannabiculture » domestique.


PLAN

➔ GÉNÉRALITÉS.

➔ LE PROCESSUS DE PRODUCTION EN INTÉRIEUR.

➔ LA MAITRISE DU TEMPS, UNE SPÉCIFICITÉ DE LA CULTURE EN INTÉRIEUR.

➔ UN MATÉRIEL PARTICULIER ACCESSIBLE PAR LE BIAIS D’UN COMMERCE DÉDIÉ.


➔ LA DÉTECTION DES LIEUX DE CULTURE.



GÉNÉRALITÉS

Longtemps cultivé pour ses caractéristiques fibreuses, le chanvre a fait l’objet des premières réglementations suite à la découverte de ses propriétés psychotropes au 20 e siècle.

Malgré l’existence de divergences entre botanistes, le cannabis sativa (famille des cannabinacées), est généralement subdivisé en quatre sous-espèces :

le cannabis sativa sativa.

le cannabis sativa indica (cultivé dans le nord de l’Inde).

le cannabis sativa spontanea (présent sur une large bande reliant l’Europe centrale à l’Asie).

le cannabis sativa kafi ristanica (poussant dans les montagnes d’Afghanistan et du Pakistan).


Chacune de ces sous-espèces présente des caractéristiques particulières en terme d’adaptation au milieu de culture, de modalité de croissance ou encore de taille atteinte par le plant mature.

La plante de cannabis est principalement dioïque ce qui signifie que par opposition aux plantes monoïques, les plants mâles et femelles sont séparés.

Dans le cadre d’une production en intérieur, des plants femelles seront cultivés car eux seuls produisent en quantité suffisante le principe actif recherché.

En effet, ces derniers contiennent, en dose nettement supérieure aux plants mâles, le tétrahydrocannabinol (communément désigné sous l’acronyme THC), substance psychoactive contenue majoritairement dans les sommités florifères et fructifères de la plante.

Ainsi, pour le cannabis, le taux de concentration peut varier dans une fourchette de 4 à 35 % en fonction de la variété cultivée, du mode de culture et du degré de professionnalisme atteint par le producteur.

Le cannabis sativa spontanea est la seule des quatre sous-espèces précédemment mentionnées à ne pas contenir un taux significatif de THC (taux avoisinant les 0,5 %).

Il n’est pas rare de le voir pousser à l’état sauvage dans les fossés de certaines contrées d’orient. Cette rusticité est recherchée dans la création de plants de cannabis hybrides.

En effet, la quasi-totalité des plantes cultivées pour leurs propriétés psychoactives sont des hybrides combinant les quatre sous-espèces décrites précédemment.

Régulièrement de nouveaux hybrides voient le jour et sont mis sur le marché.

On ne compte plus les variétés de graines qu’un cultivateur est à même de se procurer auprès de véritables banques spécialisées.

Le taux de 35 % de THC précédemment évoqué a été atteint lors de la culture de certaines variétés de plantes élaborées aux Pays-Bas.

Le chanvre destiné à la fabrication de stupéfiant et le chanvre industriel sont tous deux du cannabis sativa.

La production de paille de chanvre est un secteur très contrôlé.

Ainsi, pour prévenir toute dérive, le chanvre industriel doit afficher un taux inférieur à 0.2 % de tétrahydrocannabinol.

LE PROCESSUS DE PRODUCTION EN INTÉRIEUR

Les terminaisons florifères et fructifères des plants femelles sont recherchées par les producteurs car elles concentrent l’essentiel du THC.

Avant de parvenir au stade ultime de la récolte, le cycle de production comporte un certain nombre de phases.

Si le temps nécessaire pour amener un plant à maturité varie en fonction de l’environnement dans lequel il se développe (éclairage, température, hygrométrie, nutriments), il est possible de distinguer quatre étapes principales.

1- LA GERMINATION

La germination : une semaine en intérieur.

À ce stade, rien ne permet de discriminer les plants mâles des plants femelles.

Des banques de graines assurent la commercialisation de graines qu’elles garantissent « féminisées ».

2- L’APPARITION DU PLANT (OU BOUTURE)

L’apparition du plant (ou bouture) : une à deux semaines.

Pour obtenir un meilleur rendement, le producteur peut être tenté de gagner du temps et de s’affranchir des aléas de la germination en se procurant directement des boutures.
Ce procédé sera généralement privilégié dans les productions à vocation commerciale.

Le support de culture peut être du terreau ou encore hors sol. Dans cette dernière hypothèse, la culture est dite hydroponique.

Elle consiste à faire croître la plante dans un substrat neutre qui sera irrigué par une solution lui procurant les nutriments nécessaires.

3- LA CROISSANCE

La croissance : quatre à six semaines.

Le plant se développe en se garnissant en feuilles.

Lors de cette phase de la production, la plante a besoin de beaucoup de lumière ce qui nécessite un éclairage prolongé (plage horaire allant jusqu’à dix-huit heures d’affilée).

4- LA FLORAISON

La floraison : une à deux semaines.

C’est le stade ultime avant la récolte.

Durant cette période, le besoin en luminosité de la plante se stabilise aux alentours de douze heures.

La plante sera à l’issue coupée et mise en séchage à plat ou suspendue.

Lors de chacune de ces phases l’intervention humaine est nécessaire.

Dans les plantations à vocation commerciale, il n’est pas rare de voir les producteurs dormir sur les sites de culture afin de veiller à la bonne croissance des plantes, de garantir le bon fonctionnement de l’installation mais également de se prémunir d’intrusions malveillantes de concurrents.

LA MAITRISE DU TEMPS, UNE SPÉCIFICITÉ DE LA CULTURE EN INTÉRIEUR

En extérieur, le cycle de vie de la plante de cannabis est annuel, ce qui ne permet qu’une récolte par an.

La culture en intérieur permet au cannabiculteur de s’affranchir du cycle des saisons et des aléas climatiques mais elle lui permet surtout d’avoir la maîtrise du temps.

En organisant sa production de façon optimale, trois à cinq récoltes par an sont envisageables.

L’enchaînement des cycles augmente le volume de production et par conséquent le montant des bénéfices tirés d’une éventuelle revente.

UN MATÉRIEL PARTICULIER ACCESSIBLE PAR LE BIAIS D’UN COMMERCE DÉDIÉ

La culture en intérieur nécessite un matériel spécifique.

Kit de culture en intérieur.

La croissance et l’optimisation du rendement de la plante exigent qu’elle pousse dans un environnement où la luminosité, l’hygrométrie (humidité de l’air), la température ou encore les apports en nutriments sont contrôlés.

Certaines enseignes se sont positionnées sur ce créneau et offrent à leurs clients l’intégralité du matériel nécessaire à une culture de cannabis en intérieur.

Lampe à sodium.

Sont donc commercialisés des lampes à sodium, des engrais, des systèmes d’aérations, des filtres à charbon actif, des ventilateurs, des caissons antibruit, soit tout le matériel nécessaire.

Filtre à charbon.

Il est même possible de se procurer des kits complets pour débuter une production.

Généralement présenté comme destiné à la culture de plants de tomates ou d’orchidées, ce matériel
n’est pas illégal et peut par conséquent être librement proposé à la vente.

De la même manière certains ustensiles indispensables au cannabiculteur sont utilisés dans des plantations plus conventionnelles ou chez certains jardiniers amateurs.

La découverte de ces outils peut néanmoins alerter sur la présence potentielle d’une culture illicite.

Ainsi peut-on découvrir des ustensiles de type thermomètre, vaporisateur, testeur de PH et d’EC (électroconductivité), hygromètre, pince, sécateur, verre doseur, luxmètre, balance de précision, pipette
ou encore seringue.


À côté de ces magasins désignés sous l’anglicisme « growshop », des sites internet affiliés ou autonomes proposent le commerce numérique de matériel équivalent.

Certains d’entre eux proposent également différentes variétés de graines de cannabis destinées à la culture.

Cette activité étant prohibée en France, les sites offrant à la vente des sachets de graines sont hébergés hors de nos frontières notamment aux Pays-Bas et en Espagne.

Certaines « banques de graines », mettant en avant les nombreuses distinctions qu’elles ont pu recevoir, ne se privent pas pour vanter la qualité génétique de leurs hybrides.

LA DÉTECTION DES LIEUX DE CULTURE

L’examen d’un certain nombre d’indicateurs permet de révéler et parfois de confirmer l’existence d’un lieu de culture de cannabis.

L’ODEUR CARACTÉRISTIQUE DES PLANTATIONS DE CANNABIS

La culture de cannabis dégage une odeur caractéristique et puissante, différente de celle des
sommités florifères et fructifères sèches (communément appelées « les têtes »).

La diffusion de ces effluves est problématique pour le cultivateur qui cherchera à dissimuler ce phénomène en insérant des filtres à charbon actif dans les systèmes de ventilation et d’aération de la plantation.

Il est également possible d’utiliser un générateur d’ozone qui assainit l’air et élimine les odeurs.

Il existe d’autres dispositifs moins sophistiqués (boules antimites, parfum, etc.).

En cas d’absence de filtre ou d’insuffisance du dispositif, les seules capacités olfactives des
enquêteurs peuvent leur permettre de détecter cette odeur notamment sur un palier d’immeuble.
Cette dernière est vraiment identifiable et a pu être synthétisée.

LE BRUIT GÉNÉRÉ PAR L’INSTALLATION

La culture de cannabis génère, par l’utilisation de matériel d’aération, des nuisances sonores.

Le producteur avisé équipera sa plantation de matériels spécifiques destinés à limiter l’impact sonore
de son installation.

Ainsi le circuit d’extraction d’air pourra être contenu dans des caissons anti-bruit ou des gaines d’aération insonorisées.

En présence d’une telle installation, le bruit occasionné est considérablement amoindri, mais comme pour l’odeur, l’absence ou la défaillance du dispositif peut aider à la détection d’un lieu de culture.

LA GESTION DES DÉCHETS DE PRODUCTION

Une des difficultés de la culture en intérieur réside dans la gestion des déchets issus de la plantation.

L’élimination du matériel usagé (filtres, pots, etc.) mais également des résidus de production (tiges, feuilles) constitue une étape délicate.

Ainsi le matériel pollué, les mottes de terre usagées ou les substrats peuvent être stockés en extérieur (parfois de façon visible) dans l’attente de leur évacuation.


Le stockage en intérieur (cave, garage…) peut également être une solution temporaire, mais l’augmentation du volume de production débouchera nécessairement sur une problématique de gestion et d’évacuation des déchets du lieu de culture.

LA CULTURE EN INTÉRIEUR : UNE ACTIVITÉ ÉNERGIVORE

Du fait de l’emploi de matériels électriques, la culture de cannabis est une activité énergivore.

Ainsi, en phase de croissance, le plant nécessite un éclairage quotidien de dix-huit heures.

Cette exigence, ainsi que la nécessaire ventilation des lieux, conduit à augmenter de façon significative la consommation d’énergie et impacte le montant de la facture délivrée par le prestataire.


Dans le cadre d’importantes plantations, la culture s’accompagne assez fréquemment de l’infraction de vol d’énergie. La dérivation du courant électrique intervient généralement avant le compteur.

LE RAYONNEMENT THERMIQUE ET LE HALO LUMINEUX

Le rendement d’une culture en intérieur dépend du niveau de technicité atteint par le « cannabiculteur ».
Ce dernier influera sur sa production en sachant combiner plusieurs éléments tels que l’hygrométrie,
l’éclairage ou encore la température.

Des dispositifs sont commercialisés pour garantir une température variant, en fonction du stade de développement de la plante, entre 20°C et 28°C.

Par conséquent, en fonction de son lieu d’implantation (hangar, sous pente…) et de la qualité de
l’isolation des lieux, la culture en intérieur aura un impact thermique qui pourra être détecté avec un appareillage idoine.

Une luminosité intense est nécessaire pour la bonne croissance des cultures (lampes de plusieurs
centaines de watt).

Même si le producteur cherche à opacifier le lieu de culture en calfeutrant les ouvertures, la présence d’un
halo lumineux peut trahir l’existence d’une plantation.

La teinte de la lumière dégagée varie d’un blanc très vif à des tons jaune doré.

LA CULTURE EN INTÉRIEUR, FACTEUR EXPLICATIF D’INCENDIES

La combinaison eau / électricité / chaleur augmente les risques d’incendie.

Ainsi en milieu urbain, lorsqu’un feu se déclare dans une plantation, le risque de propagation du foyer d’incendie au voisinage est important.

La découverte de matériels de culture dans les débris d’incendie a déjà été signalée lors d’expertises réalisées en France.

Par ailleurs, la culture en intérieur de cannabis peut conduire à une dégradation durable des lieux accueillant une telle activité.

Malgré les précautions relatives à la protection des sols et murs (aération de la plantation, application de fongicides dans les espaces dédiés aux cultures), ces derniers peuvent conserver les stigmates de l’activité passée (traces d’humidité, de moisissure, présence de déchets,
altération des sols, etc.).


Par ailleurs, l’importante consommation d’eau d’une plantation et la perfectibilité de certains systèmes d’étanchéité font encourir au voisinage le risque d’un dégât des eaux.

UNE ATMOSPHÈRE VICIÉE

Afin de favoriser la photosynthèse, l’air ambiant des plantations peut présenter un taux élevé de dioxyde de carbone (CO 2 ).

Pour enrichir l’atmosphère de ce gaz, des générateurs de CO 2 sont utilisés.

L’inhalation de dioxyde de carbone provoque des maux de tête et se traduit par une élévation anormale du rythme respiratoire.

À l’apparition des premiers symptômes, il est impératif de quitter les lieux au plus vite.
Dans certaines plantations, la présence de monoxyde de carbone a également été détectée.

Ce gaz très toxique peut être mortel pour l’homme.


L’air ambiant d’un lieu de culture se révèle également vicié par le pollen libéré par les plants adultes ou encore l’utilisation de pesticides destinés à neutraliser insectes et parasites.
À l’instar du soufre diffusé pour prévenir l’apparition et la prolifération de champignons (gaz reconnaissable à son odeur d’œuf pourri), l’inhalation de toutes ces substances peut provoquer des réactions allergiques ou une irritation des voies respiratoires.

Par ailleurs, la présence d’eau stagnante dans les cultures favorise la prolifération de la légionellose. L’utilisation, dans les lieux de culture, de diffuseur de brumes augmente le risque d’inhalation de gouttelettes contaminées par la bactérie.



Si le cannabis a pu bénéficier, un temps, d’une certaine indulgence, de nombreuses études menées ces dernières années ont mis en évidence les risques associés à sa consommation : pertes de mémoire, de concentration, troubles de l’humeur, altération de la perception et des réflexes notamment sur la route ou au travail, dislocation des liens sociaux …

Pour autant, et en dépit d’une légère baisse de la consommation chez les plus jeunes, le cannabis reste le produit psychotrope le plus consommé en Europe.
Et la France ne fait pas exception à la règle.
Dans ce contexte de consommation importante, le marché du cannabis a subi de profondes transformations ces dernières années.
La résine marocaine est remplacée de plus en plus souvent par l’herbe de cannabis dont la consommation a explosé.

Suivant l’exemple des pays étrangers (les Pays-Bas, mais également l’Angleterre qui produit au
moins 60 % de sa consommation), certains ont commencé à exploiter dans des hangars, appartements ou pavillons, les méthodes de l’agriculture intensive, et veulent développer sur le territoire
une culture dite « indoor », assurant à des plants de cannabis génétiquement modifiés pour la
circonstance un taux de THC (la substance active) particulièrement élevé.

Ce rendement a nécessairement aiguisé l’appétit des organisations criminelles, pour lesquelles il
s’avère d’autant plus rentable de produire dans la zone même de consommation : elles s’évitent
ainsi les risques inhérents au transport des produits stupéfiants.


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