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Etude CBD.

Etude CBD.

Analyse d’échantillons de produits à base de CBD en vente libre : 8 produits sur 10 ont une composition différente de celle indiquée sur l’étiquetage

Résultats de l’étude Cannabidiol (CBD) : analyse de produits « CBD non pharmaceutiques » disponibles en France de C. Chevallier, L. Charuel, C. Richeval, L. Chaouachi, L. Del Valle, C. Eiden, J.-M. Gaulier et A. Batisse.

Source : MILDECA – 09 novembre 2023.


Cette étude menée entre 2022 et 2023 par trois centres d’addictovigilance (Paris, Lyon, Montpellier), en partenariat avec le laboratoire de Toxicologie du CHU de Lille et Drogues Info Service et soutenue par la MILDECA, a analysé la composition des produits à base de CBD (hors médicaments) en vente libre et leur conformité avec leur étiquetage.

L’étude éclaire l’état du marché des produits à base de CBD en France, alors que les données du Baromètre 2022 de Santé publique France révèlent que 10% des Français en ont consommé dans l’année. Elle ne se substitue toutefois aucunement aux opérations de contrôle qui sont menées par les autorités et qui peuvent aboutir à des suspensions de mises sur le marché ainsi qu’à des retraits-rappels de produits (https://rappel.conso.gouv.fr). C’est le cas notamment pour les produits alimentaires :

dès lors que la présence de CBD est non conforme à la réglementation, dans la mesure où cette substance est catégorisée comme un nouvel aliment non autorisé à ce jour par la Commission européenne ;

et/ou lorsque les modalités de consommation de ces denrées conduisent à exposer le consommateur à une dose de Δ9-THC supérieure à la dose de référence aiguë définie par l’EFSA (1 µg/kg de poids corporel).

Les principaux résultats de cette étude indiquent que :

1/ – Seul un échantillon sur deux (46%) présente un étiquetage de la composition. Pour les échantillons avec étiquette, 81% des produits analysés ont des teneurs en CBD différentes de celles indiquées sur l’étiquetage.

2/ – Le taux médian de CBD se situe autour de 4%. 69% des échantillons analysés ont une concentration en CBD inférieure à celle indiquée sur l’étiquette ; 4 analyses révèlent une présence quasiment nulle de CBD. Ces écarts sont constatés dans toutes les filières d’achat : vente en ligne, boutique CBD, pharmacie d’officine, bureau de tabac.

3/ – 87% des produits analysés ont une teneur en Δ9-THC inférieure à 0,3%. La teneur en Δ9-THC la plus élevée dosée dans les produits analysés ne dépasse pas 1,2%. Pour les denrées alimentaires, il convient de rappeler qu’une teneur en Δ9- THC inférieure à 0,3% ne préjuge pas que le produit ne présente pas de risque pour le consommateur. 6% des échantillons contiennent des néocannabinoides, tels que HHC, Δ8-THC et H4-CBD, alors même qu’ils n’étaient pas mentionnés sur l’étiquetage. Dans ce contexte, le consommateur se retrouve à consommer une substance psychoactive à son insu. C’est sur la seconde période d’achat (2023) qu’ils sont plus particulièrement retrouvés.

4/ – Aucune autre substance psychoactive ou de coupe (xénobiotique) n’est retrouvée en dehors des phytocannabinoides naturels ou d’hémisynthèse.

5/ – L’étude de marché sur 33 sites de vente en ligne met en évidence que de nombreux vendeurs ne respectent pas la réglementation. D’une part, ces derniers ont développé et mettent sur le marché de nombreux produits alimentaires à base de CBD alors même qu’il s’agit d’un nouvel aliment et qu’aucun produit présent sur le marché ne bénéficie d’une autorisation au sein de l’Union européenne et, d’autre part, pour les produits à inhaler et les produits cosmétiques, les vendeurs allèguent des vertus thérapeutiques de leurs produits.


Méthode :

Après une étude de marché du CBD dans 3 régions françaises, un achat aléatoire a été réalisé sur l’ensemble des boutiques référencées en englobant la majorité des types de produits disponibles : fleurs, résine, wax, E-liquide, produits alimentaires ou cosmétiques.

Une analyse toxicologique à la fois qualitative et quantitative, ciblée (Δ9-THC, Δ8-THC, CBD, CBN, THCA, CBDA, HHC et H4-CBD) et non ciblée (autres xénobiotiques dont les nouveaux produits de synthèse) a été réalisée par différentes techniques de chromatographies liquides (CL-SM/SM et CL-SMHR).

Au total, 223 échantillons de CBD ont été collectés sur 2 périodes d’achat distinctes (juillet 2022 et avril 2023) et analysés.

Les produits achetés étaient majoritairement à inhaler (85% : fleur, pollen, résine, crumble, wax, POD, E-liquide), mais aussi à ingérer (14% : bonbons, sucette, gélule) ou à appliquer en topiques (1% : crèmes cosmétiques).

Les filières d’achat étaient des shops en ligne (66%), des boutiques spécialisées de CBD (15%), des bureaux de tabac (11%), des pharmacies d’officine (4%) ou des boutiques de vapotage (4%).


Notes de synthèse CBD 2023
Cannabidiol (CBD) : analyse de produits « CBD non pharmaceutiques » disponibles en France C. Chevallier1 , L. Charuel2 , C. Richeval3 , L. Chaouachi2 , L. Del Valle 1 , C. Eiden4 , J.-M. Gaulier3 , A. Batisse2 1CEIP-A de Lyon, 2CEIP-A de Paris, 3 Laboratoire de toxicologie du CHRU de Lille, 4CEIP-A de Montpellier.

Cette recherche a bénéficié du soutien de la Mission Interministérielle de Lutte contre les Drogues et les Conduites Addictives (MILDECA).

Disponible sur Internet comme dans le commerce (bureau de tabac, pharmacie d’officine, boutique CBD ou vapotage etc..), le «CBD non pharmaceutique» appelé également «cannabis light» ou «cannabis bien-être» a pris son essor depuis près de trois ans en France.

Les modifications de réglementation du CBD survenues en 2021 ont abouti à un déploiement exponentiel de ces produits, associé à un marketing agressif.

L’utilisation du « CBD non pharmaceutique » concerne toutes les classes d’âge et toutes les classes sociales, allant du mineur expérimentateur de puff à la personne âgée douloureuse.

Présentés avec des vertus thérapeutiques diverses et variées, le marché du CBD s’est entrechoqué avec l’arrivée du cannabis médical.

Une confusion générale s’est installée dans l’hexagone entre le CBD dit «bien-être» et le CBD pharmaceutique à usage médical.

En tant que structure de veille sanitaire sur les substances psychoactives, les Centres d’Addictovigilance ont vu émerger les risques liés à la consommation de ce «CBD bien-être», notamment du fait de la présence possible d’autres cannabinoïdes non attendus.

Dans ce contexte, il est apparu important d’étudier la qualité des produits disponibles sur le marché afin d’informer les consommateurs de manière éclairée.

Ce projet d’addictovigilance (pilotée par les CEIP-A de Paris, Lyon et Montpellier), en partenariat avec le laboratoire de toxicologie du CHU de Lille, vise à analyser la composition réelle d’un panel de produits «CBD non pharmaceutiques» afin d’évaluer notamment l’adéquation entre le contenu annoncé sur l’étiquetage du produit et celui réellement présent.

Après une étude de marché du CBD dans 3 régions françaises, un achat aléatoire a été réalisé sur l’ensemble des boutiques référencées en englobant la majorité des types de produits disponibles : fleurs, résine, wax, E-liquide, produits alimentaires ou cosmétiques.

Une analyse toxicologique spécifique et sensible des échantillons achetés a été réalisée par différentes techniques de chromatographies liquides (CL-SM/SM et CL-SMHR). Celles-ci étaient à la fois qualitative et quantitative, à la recherche de cannabinoïdes naturels ou d’hémisynthèse (Δ 9 -THC, Δ 8 -THC, CBD, CBN, THCA, CBDA, HHC et H4-CBD) mais également de toutes autres substances actives qui ne seraient pas mentionnée dans la composition des échantillons telles que médicaments, drogues traditionnelles, nouvelles drogues de synthèse ou produits de coupe.

Au total, 223 échantillons de CBD ont été achetés sur 2 périodes d’achat distinctes (juillet 2022 et avril 2023), et analysés.

Les produits étaient majoritairement à inhaler (85% : fleur, pollen, résine, crumble, wax, POD, E-liquide), ou à ingérer (14% : bonbons, sucette, gélule) ou à appliquer en topiques (1% : crèmes cosmétiques).

Les filières d’achat étaient des sites internet de vente en ligne (66%), des boutiques spécialisées de CBD (15%), des bureaux de tabac (11%), des pharmacies d’officine (4%) ou des boutiques de vapotage (4%).

L’étude de marché sur 33 sites de vente en ligne a mis en évidence que de nombreux vendeurs ne respectaient pas la réglementation et alléguaient des vertus thérapeutiques de leurs produits CBD. Seul 1/3 des sites internet précise que le CBD n’est pas considéré comme un médicament. Seul 1 site sur 2 préconise l’usage uniquement chez les personnes majeures.

ANALYSES TOXICOLOGIQUES A LA RECHERCHE DES CANNABINOIDES NATURELS OU D’HEMISYNTHESE :
1. Concernant les taux de Δ 9 -THC (principal constituant psychoactif du cannabis) contenu dans les échantillons de CBD : près de 90% des produits vendu dans la filière «CBD bien-être» de l’échantillonnage de l’étude (n=195/223) présentent un taux de Δ9-THC < 0,3%. 28 échantillons (12,5%) ont un taux de THC > 0,3%. Très loin des taux de Δ9 -THC retrouvés habituellement dans le cannabis récréatif, les taux retrouvés varient avec un maximum à 1,2%. Il s’agit principalement d’échantillons à inhaler (herbe, résine, pollen et E-liquide). Ces échantillons proviennent de toutes filières d’achat : de la boutique CBD à la pharmacie d’officine, en passant par les bureaux de tabac. Sur les deux périodes étudiées, la part d’échantillons de CBD présentant un taux de Δ9 -THC au-delà de 0,3% tend à augmenter : en 2022, 8% parmi les 65 échantillons comparés à 2023, 14,5% parmi les 158 échantillons.
2. Concernant les taux de CBD : inadéquation entre l’étiquetage des échantillons de CBD et la composition réelle retrouvée. Il faut noter que seul un échantillon sur deux présente un étiquetage de la composition. Parmi les échantillons qui ont un étiquetage, seuls 19% ont un taux réel correspondant à celui annoncé (marge d’erreur de 20%). Dans la majorité des produits, la concentration en CBD est inférieure à celle indiquée (69%). Le taux médian de CBD est faible et se situe autour de 4% avec un taux maximum retrouvé à 90%. Pour 4 échantillons, le CBD est retrouvé sous forme de traces uniquement (Puff/POD/cookies) et reflète des pratiques commerciales abusives (arnaques).
3. Concernant les cannabinoïdes d’hémisynthèse (HHC, Δ 8-THC, HHC et H4-CBD) : les analyses
révèlent la présence de ces nouveaux cannabinoïdes dans 5,4% des échantillons (12/223) alors même
qu’ils n’étaient pas mentionnés sur l’étiquetage. Dans ce contexte, le consommateur se retrouve à
utiliser une substance psychoactive à son insu. C’est sur la seconde période d’achat de notre étude
(2023) qu’ils sont plus particulièrement retrouvés.

ANALYSES TOXICOLOGIQUES A LA RECHERCHE DE TOUTES AUTRES SUBSTANCES PSYCHOACTIVES
Les échantillons de CBD achetés dans l’étude ne contiennent aucune autre substance psychoactive :
ni médicaments, ni drogues traditionnelles, ni nouvelles substances psychoactives, ni produits de
coupe.

L’ESSENTIEL A RETENIR

Dans la grande majorité des échantillons analysés, le « CBD non pharmaceutique » ne relève pas de la législation pénale des stupéfiants (THC < 0,3 %).

Cependant cette étude met en évidence des défauts de qualité des produits CBD avec des concentrations inférieures, supérieures ou non précisées jusqu’à l’arnaque et ce pour toutes filières d’approvisionnement confondues et pour toutes formes de produit.

Depuis 2023, on constate que le marché du CBD peut être une porte d’entrée détournée pour les néocannabinoïdes.

Ces produits pour certains non encore réglementés ont des propriétés psychoactives et des effets souvent mal connus mais parfois graves comme l’a montré le HHC.

Cette entrée des néocannabinoïdes dans le marché du CBD et à l’insu des consommateurs est un phénomène à surveiller au vu des risques sanitaires potentiels.

Le CBD est une substance psychoactive qui n’est pas inerte pharmacologiquement.
Sa consommation peut induire de la somnolence et des troubles de la vigilance.
Chez l’Homme, des interactions entre le CBD et un certain nombre de médicaments ont été mises en évidence.
La prise de CBD de manière concomitante avec des médicaments nécessite un avis médical en raison du risque de perte d’efficacité des traitements médicamenteux des patients ou de la majoration des effets indésirables.
L’autorisation de la mise sur le marché de l’Epidyolex (100 mg/mL) interroge sur l’absence d’une dose d’exonération pour ces produits non pharmaceutiques à l’image de la mélatonine.
A la différence des médicaments à base de cannabis médical disponibles en France dans le cadre de l’expérimentation pilotée par l’ANSM, le commerce du CBD non pharmaceutique s’inscrit dans une règlementation complexe, différente selon les catégories de produits (alimentaires, cosmétiques, vapotage…) et ne fait l’objet que de peu de contrôle de mise sur le marché.

Il devrait répondre aux mêmes exigences que le CBD pharmaceutique, avec une production contrôlée et des normes qualités.

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