
La coordination régionale de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives publie son rapport annuel sur la consommation de produits stupéfiants dans la région et la métropole lilloise en 2021. Extraits et éclairage, avec Brandon Dutilleul, coauteur.
Par Sami CHEBAH.
La cocaïne plus que jamais |
Sans grande surprise, le stupéfiant issu de la coca progresse; « La cocaïne prend une place de plus en plus importante. C’est un point central du rapport régional, qu’on retrouve d’ailleurs dans toute la France. Et notamment la cocaïne basée ». En d’autres termes, le crack « cuisiné » par les usagers de drogue eux-mêmes, en très forte progression à Lille, comme l’a révélé récemment une enquête de La Voix Du Nord.
Les « effets délétères » de la pandémie |
Chez les consommateurs les plus précaires, comme chez les usagers de drogues en milieu festif, la pandémie comme les confinements ont eu « des effets délétères » décrit Brandon Dutilleul, coauteur du rapport Trend (1). « Les usagers de drogue en milieu festif ont du modifier leurs habitudes, ils se sont retrouvés très isolés, ont essayé de recréer des espaces un peu festifs chez eux. Les usagers les plus précaires ont quant à eux eu moins accès aux prestations sanitaires et sociales, avec des structures qui étaient parfois fermées. Sur les six premiers mois de 2021, c’est encore marquant ».
(1) Rapport Trend : Tendances récentes nouvelles drogues, à Lille et dans les Hauts-de-France en 2021, par Brandon Dutilleul et Sébastien Lose (CedrAgir).
Le chemsex |
De plus en plus présent, le chemsex, c’est l’usage de drogues dans le cadre de pratiques sexuelles. Les stupéfiants utilisés : la cocaïne, le GHB/GBL ou la 3MMC « la 3MMC, c’est le produit phare, mais tout ce qui va être stimulant peut être utilisé, explique Brandon Dutillleul. Parce que ce qui est recherché c’est la performance, ou l’idée de durer ». Un usage dangereux, avec des pratiques sexuelles qui peuvent devenir à risque. « Ce n’est pas nouveau, sauf qu’avant, c’était surtout présent dans le milieu gay, avec un public qui avait la cinquantaine voire la soixantaine, inséré, qui a les moyens d’accueillir du monde, dans une maison ou un appartement’. Pour des soirées à multiples partenaires, arrosées de drogues. « Depuis le confinement, on a noté un public plus jeune, parfois des étudiants, qui se tournent vers le chemsex. » Et puis : « c’est marginal, mais certains découvrent la drogue à travers la pratique du chemsex ».
Le protoxyde d’azote |
Les petites cartouches métalliques qui jonchaient les caniveaux ont été remplacées par de grosses bonbonnes (300 cartouches) de protoxyde d’azote, un gaz utilisé dans les préparations culinaires mais détourné de son usage. « Dans la grande majorité des cas, c’est utilisé dans un cadre festif et il n’y a pas de conséquences dramatiques. Mais au CHR de Lille, il y a de plus en plus de cas sévères recensés, avec des troubles neurologiques » alerte le rapport Trend.
Dans la région, on fume (un peu) moins de cannabis qu’ailleurs |
HAUTS-DE-FRANCE.
Des jeunes de moins en moins fumeurs de joints, des usagers plus nombreux après 35 ans, mais des Nordistes moins consommateurs de cannabis qu’ailleurs en France. C’est ce qui ressort de la dernière étude « Tendances » de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT). En France, 47,3 % des sondés déclarent avoir fumé au moins une fois dans leur vie (54,9 % d’hommes, 39,9 % de femmes). Un chiffre en légère hausse : ils étaient 44,8 % en 2017, lors de la dernière étude. Le reste des indicateurs sont stables voire en baisse : 10,6 déclarent un usage lors de l’année écoulée, 5,9 % lors du dernier mois, 3 % déclarent au moins 10 usages lors des 30 derniers jours, et 1,7 % un usage quotidien.
Et dans la région ? Tous les indicateurs sont en dessous des moyennes nationales. Sur les 1 582 personnes interrogées, 38,8 % indiquent avoir consommé du cannabis au moins une fois dans leur vie, 9,8 % lors de l’année écoulée, 5,5 % lors du dernier mois, 2;7 % déclarent moins de 10 usages lors des 30 derniers jours, et 1,3 % un usage quotidien. Les auteurs de l’étude indiquent que « l’écart maximal avec la moyenne nationale (est) observé dans les Hauts-de-France (- 8 points) ». En Occitanie, ils sont 55,1 % à avoir consommé au moins une fois dans leur vie.
GÉNÉRATION 2000.
Cette étude révèle également des disparités au niveau de l’âge : « La consommation de cannabis reste globalement plus importante parmi les moins de 35 ans » mais « l’âge moyen des usagers actuels de cannabis ne cesse d’augmenter : il est passé de 25,1 ans à 32,8 ans entre 1992 et 2001 ».
Une tendance qui s’explique par « le vieillissement des générations qui déclaraient avoir expérimenté à la fin des années 1990 – et dont une partie à continué de consommer – qui ont actuellement entre 40 et 50 ans » et par « l’arrivée dans les âges de consommation de la génération née dans les années 2000, moins consommatrice que les précédentes ».
ANTOINE MAES.